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Le travail en prison. Enquête sur le business carcéral

Gonzague Rambaud, Paris, Autrement « Mutations », 2010.

Pas besoin de délocaliser en Chine, en Pologne ou en Roumanie pour pouvoir rémunérer, légalement, des personnes 3 euros de l’heure, il suffit pour cela de solliciter les ateliers pénitentiaires, où des détenus œuvrent, sans contrat de travail, pour des grandes entreprises, des PME et des TPE, issues de secteurs aussi variés que la cosmétique, l’automobile, l’imprimerie, le marketing, etc. Elles ont pour point commun de ne pas se vanter de ce type de sous-traitance.

Bien qu’écartés de la vie économique, les détenus y participent à leur manière. Lorsque l’activité le permet, 23 000 détenus (40 % de la population carcérale) travaillent 6 h par jour, ou suivent une formation professionnelle. Souvent peu qualifiés et faiblement rémunérés, les travaux d’usinage réalisés dans les ateliers pénitentiaires pour le compte d’entreprises sont très majoritairement payés à la pièce. Les fiches de paie d’anciens détenus, qui ont accepté de raconter leur vie professionnelle sous les verrous, attestent qu’il est difficile de gagner plus de 300 euros par mois lorsqu’on travaille pour des entreprises ou des marques comme Yves Rocher, L’Oréal, BIC, Renault, Vania, La Redoute, Bouygues, etc. Peu bavardes sur ce type d’initiatives, ces entreprises s’abritent généralement derrière leurs fournisseurs pour expliquer leur présence en prison. Les directeurs achats et marketing qui sous-traitent en prison disent tout ignorer ou presque des rémunérations pratiquées et des conditions de travail, symbolisées par l’article D 103 du Code de procédure pénale, qui stipule que « les relations entre l’organisme employeur et le détenu sont exclusives de tout contrat de travail ».

Pas d’indemnité journalière en cas de maladie, des difficultés pour faire reconnaître les accidents de travail, peu de recours, pas de congés, pas d’indemnité chômage. En prison, on ne s’embarrasse pas avec le droit du travail. Rarement évoqué dans des ouvrages généralistes, le travail en prison a pourtant une importance capitale pour nombre de détenus, qui ont besoin de gagner de l’argent pour vivre en prison et pour soutenir leur famille et qui doivent faire face aux frais d’incarcération (transports, hébergement, perte du RMI, etc.). Enfin, même si le travail n’est plus obligatoire depuis la loi du 22 juin 1987, il reste un critère décisif pour obtenir des remises de peine supplémentaires. Le travail rend libre plus vite, à condition de se plier à ce no man’s land juridique.

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