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Travail en prison : comment ça marche ?

Combien de détenus travaillent ?

Selon les chiffres fournis par l’administration pénitentiaire (AP) pour l’année 2011, 24 934 personnes écrouées ont eu une activité rémunérée. Des chiffres à modérer toutefois. Dans son dernier rapport, le contrôleur général des lieux de privation de liberté, Jean-Marie Delarue, avait ainsi pondéré les chiffres de l’AP fournis pour l’année 2010 car il prend en compte les détenus bénéficiant d’une formation professionnelle et ceux exerçant un emploi à l’extérieur de la prison dans le cadre d’un aménagement de peine. Une observation valable pour les chiffres 2011. Selon l’AP, 24 001 personnes sous écrou ont pratiqué une activité rémunérée en 2010, soit 39,1 % d’entre elles. Le CGLPL explique que, sur les 24 001 personnes incarcérées ayant exercé une activité rémunérée, "seules 17 497 personnes ont été rémunéré au titre d’un travail en détention", soit 27,7 % des 63 000 personnes détenues en 2010.

Comment s’organise le travail en détention ?

Il en existe plusieurs formes. Il y a d’abord le service général. Dans ce cas, les personnes sont employées par l’administration pénitentiaire et réalisent des travaux d’entretien des locaux ou des tâches nécessaires au fonctionnement des établissements, comme la cuisine, la distribution des repas, etc. Et il y a le travail en production. Dans ce cadre, les personnes, appelées "opérateurs", travaillent soit pour le compte de la Régie industrielle des établissements pénitentiaires (RIEP) soit pour le compte d’entreprises privées.

Les personnes détenues sont mises à disposition par l’administration pénitentiaire pour réaliser le plus souvent des travaux non qualifiants. Mis à part quelques travaux qualifiants proposés par la Régie, comme de l’archivage numérique et sonore, les travaux se résument généralement à des tâches simples, répétitives, sans grande valeur ajoutée, telles du conditionnement à façon, des opérations de pliage de dépliants, d’assemblage de brochures, de façonnage de petits objets ou de la manutention.

Quelles sont les règles qui encadrent le travail en détention ?

Comme le détaille l’article 717-3 du code de procédure pénale, "les relations de travail des personnes incarcérées ne font pas l’objet d’un contrat de travail". C’est donc un droit dérogatoire du travail qui s’applique en prison. Seules les règles d’hygiène et de sécurité du code du travail s’imposent en détention. S’il n’existe pas de contrat de travail en prison, l’article 33 de la loi pénitentiaire du 24 novembre 2009 prévoit la conclusion d’un "acte d’engagement". Le texte précise que "cet acte, signé par le chef d’établissement et la personne détenue, énonce les droits et obligations professionnels de celle-ci, ainsi que ses conditions de travail et sa rémunération". On parle d’un "classement" pour désigner l’accès à l’emploi et inversement de "déclassement" pour en désigner sa sortie, qu’il s’agisse d’une démission ou d’une mesure disciplinaire.

Combien gagnent-ils ?

La loi pénitentiaire de novembre 2009 est venue préciser les modalités de rémunération des détenus. Son article 32 indique ainsi que : "La rémunération du travail des personnes détenues ne peut-être inférieure à un taux horaire fixé par décret et indexé sur le salaire minimum de croissance défini par l’article L.3231-2 du code du travail. Ce taux peut varier en fonction du régime sous lequel les personnes détenues sont employées." La rémunération se détaille comme suit : 45 % du smic pour les activités de production et entre 20 et 33 % pour le service général, selon la qualification requise pour l’activité.

L’administration pénitentiaire fixe un seuil minimum de rémunération (SMR) pour les ateliers de production. Il était en 2011 de 4,03 euros bruts de l’heure. Encore une fois, il y a un fossé qui sépare le cadre réglementaire et la réalité. Dans son dernier rapport, le CGLPL a ainsi constaté un "défaut d’application des textes". Ainsi, écrit-il, "les concessionnaires offrent aux travailleurs détenus des salaires d’une grande diversité, mais le plus souvent en dessous du SMR". Et d’expliquer que le SMR "ne semble pas être perçu comme un minimum, mais plutôt comme une moyenne ’idéale’ à atteindre".

Qui sont les employeurs ?

Outre le service général et la RIEP, de nombreuses entreprises privées disposent de concessions en prison. Si certaines, comme MKT Societal, mettaient en avant le caractère social de leur engagement en prison, la plupart rechigne à communiquer sur cette partie de leur activités. Une volonté de discrétion respectée par l’administration pénitentiaire, qui ne communique pas la liste de ces entreprises. Par ailleurs, beaucoup d’entre elles font appel à des entreprises sous-traitantes et évitent dans le même temps que leurs noms n’apparaissent.

Ainsi, Gonzague Rambaud, auteur d’un ouvrage sur le travail en prison, expliquait au Monde.fr qu’après avoir démenti avoir recours au travail des détenus, l’entreprise Bic a finalement reconnu avoir été présent de 1970 à 2007 dans les prisons de Fleury-Mérogis et d’Osny pour faire assembler des opérations marketing sur leurs stylos et leurs rasoirs. Toutefois, les détenus sont rémunérés par l’administration pénitentiaire, avec qui ils ont signé le contrat d’engagement. L’AP, pour sa part, octroie des concessions aux entreprises privées.

Quid de la retraites des personnes incarcérées ?

Depuis 1977, les personnes détenues qui travaillent acquièrent des droits à la retraite en versant des cotisations sociales au titre de l’assurance vieillesse. Toutefois, compte tenu des faibles rémunérations, les détenus ont le plus grand mal à valider leurs trimestres. Le CGLPL explique ainsi que, ignorant une circulaire de l’AP, les caisses d’assurance vieillesse appliquent les dispositions du code de la Sécurité sociale, qui indiquent que, pour percevoir une retraite de base du régime général, la validation d’un trimestre exige que la cotisation versée le soit sur un salaire au moins égal à 200 fois le smic. Or, compte tenu du niveau des rémunérations du service général dans les établissements pénitentiaires, les personnes détenues ne valident, par année travaillée, qu’un trimestre sur les quatre.

>> http://www.lemonde.fr/societe/artic...
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